Merci à l’amie qui m’a prêté ce livre, que j’ai adoré. Un jardin au désert tombait bien, je venais de voir un reportage passionnant sur l’Arabie Saoudite à la télévision et me plonger dans ce récit mettait d’autant plus d’images sur les mots. Mais Carine Fernandez, l’autrice, a-t-elle besoin d’être soutenue de véritables images tant elle sait dépeindre les lieux ? Et les personnages et leurs tourments.

L’autrice a vécu plusieurs années en qualité d’expatriée sur la péninsule arabe, ce qui explique sa capacité à nous présenter les riches saoudiens sous les différents angles qui les caractérisent et s’opposent : opulence et emploi de serviteurs sous-payés et sous estimés,  polygamie et femmes recluses dans des palais délirants de luxe, pétrodollars et charia, désert et gratte-ciels, religion et hypocrisie.

L’opposition, c’est ce que vit Talal , soixante-dix ans, homme d’affaires richissime, marié 10 fois, père de 3 fils peu aimables, et grand-père, entre autre descendance nombreuse, de Dahlia, jeune adolescente issue du mariage de Khaled – un des fils de Talal – et Sylvia, une anglaise enfuit pendant sa grossesse et à qui Talal a repris l’enfant.

L’opposition c’est le combat intérieur de Talal qui n’aspire qu’à vivre en dehors du clan familial, de la maison de son épouse actuelle qui le harcèle, de son palais où pourtant vivent celles qu’il aime : sa mère, sa première femme Aïcha, et Dahlia. Et qui pour cela part régulièrement vivre dans le désert, dans une maisonnette sans aucun confort.

L’opposition c’est l’adolescence de Dahlia, en révolte permanente, contre les lois religieuses de son pays et les diktats familiaux.

L’opposition c’est la réprobation des fils de Talal lorsque celui-ci promeut Rezak, son jardinier égyptien (comptable de formation) au grade de bras droit. Une non acceptation qui tourne à la haine lorsque Talal impose Rezak en fils spirituel.

L’opposition c’est la vie actuelle dans une Arabie Saoudite toute en expansion et contradictions, et les souvenirs de Talal.

L’opposition c’est la révolution au Caire qui menace Rezak au cours d’un séjour au pays.

L’opposition c’est vivre avec une lourde faute passée. La taire. Puis se racheter et se sacrifier.

Une fresque familiale qui met en avant Talal, Dahlia et Rezak, avec des liens qui se font, qui apparaissent, qui surprennent.
Un jardin au désert : une mise en lumière du quotidien de certains riches saoudiens dans leur prison mentale. Pas de liberté pour les femmes, un aveuglement et une hypocrisie atroce chez les hommes.
Une histoire d’amour attendue et pourtant, par son dénouement, très émouvante.

Un jardin au désert – Carine Fernandez
Editions Les escales – Paru avril 2019 – 336 pages – 19.90€