Esperluette d’Anne Vantal
Esperluette, longue lettre écrite par une jeune fille à l’ami de toujours, à l’ami perdu, révèle un lourd secret, savamment orchestré par la romancière Anne Vantal. Une lettre comme un cri dans la nuit.
« Mon Jordan,
Hier je suis retournée avenue Mozart. C’était la première fois. Je n’avais rien prémédité. Je me baladais, c’est tout, ça m’arrive maintenant, je marche sans but, comme ça, des jours entiers. Je ne recherche rien, je regarde, je déambule dans la ville, je profite de la vie. Je ne sais pas trop comment je me suis retrouvée en haut de l’avenue et du coup j’ai poussé jusqu’en haut. Ce n’était sans doute pas raisonnable, le quartier est toujours aussi calme – et au moins aussi chic qu’avant. Les voitures ont changé, pas les gens. (… ) Au réveil je t’ai senti là, bien présent, comme si toutes ces années s’étaient miraculeusement effacées, comme si nous nous étions retrouvés au terme d’un long voyage, alors j’ai décidé de t’écrire. »
C’est une longue lettre qu’une jeune femme adresse à son ami d’enfance, Jordan, l’ami de toujours. Cette lettre, c’est le regard dans le rétroviseur de leur histoire. L’explication de texte. Et dès les premières lignes on pressent que ce qui va être dit pèse. Un lourd secret surgira des pages. On s’y prépare.
L. – on ne saura jamais son vrai prénom – et Jordan se sont connus à la maternelle. Inséparables, dès le premier jour. Pas amoureux non, une sorte d’amitié comme il en existe à cet âge et qui a perduré envers et contre tout. Une amitié comme une fusion incandescente. « Ces deux-là font la paire ! », s’énervait le maître d’école lorsqu’ils faisaient les quatre-cents coups. Une amitié comme un pied-de-nez aux autres. Il faut avouer qu’ils étaient un brin frondeurs ces deux-là, avec leurs taquineries, leurs petits chapardages, oh des trucs de gosse, pour rire, rien de grave…
« A la vie à la mort », s’étaient-ils jurés à l’âge de dix ans, en se faisant saigner le bout de leurs doigts mêlés. A cet âge, on a ce genre d’idées… comme un rituel. Prémonitoire ?La suite de la chronique de Nathalie Riché, c’est ICI
Esperluette – Anne Vantal – 90 p., Actes Sud junior, coll. 9,80 € (dès 14 ans)