Les lectures d’avril de Top-Topic
Ce mois-ci les hasards des sorties littéraires m’ont fait passer entre les mains (et sous les yeux !) 3 ouvrages sortant de la forme classique du récit linéaire :
📖 Un paragraphe dédié à chacun des 172 récits d’Henri Medori dans « Une Vie d’Enfant »
📖 12 nouvelles pour « 12 Mois 12 Femmes », collectif d’auteures
📖 32 chapitres débutant par la même phrase pour « Je suis le genre de fille », de Nathalie Kuperman
« 12 mois, 12 femmes »
Les nouvelles ! Le genre littéraire que je préfère, que je lis tout le temps et partout. Ce type de recueil promet de nombreuses découvertes : toutes les 10 / 15 pages (plus ou moins) une nouvelle histoire, de nouveaux lieux, personnages, temps, événements, caractères. Un plaisir renouvelé plusieurs fois dans un même opus.
Et lorsque le recueil est conduit à plusieurs mains, la panacée ! A chaque changement d’histoire, une nouvelle plume, un nouveau ton, une nouvelle « patte », et en avant pour la grande roue de l’imaginaire.
« 12 mois 12 femmes », est un recueil collectif de nouvelles publié par les Editions Parole en mars 2018.
Les auteures, âgées entre 30 et 60 ans, ont des métiers aussi variés que professeur des écoles, assistante sociale, vendeuse de plantes, secrétaire technique, ingénieur, assistante de direction, agent territorial… Leur point commun ? Etre des lectrices passionnées, des amoureuses des mots.
À l’origine de cette aventure Valérie Marcoult. Il y a quelques années, sa sœur a été immobilisée après une opération et se morfondait sur son lit d’hôpital. Un jour, Valérie lui lance « Ecris donc ! » Mais écrire à deux mains, c’était un peu limité. Alors Valérie a imaginé un recueil autour des quatre saisons réunissant 12 femmes, 12 amies. À chacune fut attribué un mois de l’année avec une consigne : écrire une nouvelle de huit pages.
Très intéressant la capacité d’imagination des 12 auteurs. Certains textes sont malicieux (Le Jardin d’Adèle – Juillet), innovants (Il était une fois – Octobre), haletants (Promenade dans les bois – Novembre), tragiques, farfelus…
Le talent est inégal mais il y a des pépites, et surtout, que ces 12 nouvelles parlent d’amour, de filiation, de meurtre, de vengeance ou de bien d’autres thèmes, elles sont toutes écrites avec le cœur. Ainsi que le précise le collectif pour résumer la démarche « 12 femmes, un enfant commun », et vraiment c’est ainsi que l’ont ressent le travail des auteures : Natacha Verdier, Cara Tael, Florence Batisse-Pichet, Valérie Marcoult, Virginie Bardin, Corinne Pons, Caroline Gonnaud, Laurence Sharples, Sylvie Pellet, Fannie Lefebvre, Isabelle Henry et Charlotte Naturale.
Pour en savoir plus : http://www.editions-parole.net
(prix public 15€)
« Une vie d’Enfant »
Les souvenirs d’enfance d’Henri Medori, poète, entre 1950 et 1960 près du Cap Corse.
172 petits paragraphes qui chacun relate les émotions de l’auteur autour d’objets, lieux, événements, traditions, animaux, rituels : « La machine à écrire », « Le flytox », « Le platane », « Le poulailler », « Conduire », « Le premier Spoutnik, « Les feux de la Saint-Jean », « Le lézard », « Les fourmis rouges, « A Plat ventre », « Coca-Cola »…
C’est léger et charmant. L’écriture élégante et précise d’Henri Medori sert la concision des paragraphes.
Certes c’est un ouvrage qui parlera à des générations plutôt qu’à d’autres ! Quoique… A mes yeux, c’est ce genre de texte qui faut lire ou faire lire parfois à nos jeunes connectés. Oui on pense « au goût des choses simples » (retour dans les pubs d’il y a longtemps) mais quel bonheur. Le bonheur d’observer la nature, de suivre des traditions campagnardes, de se contenter de peu et d’à portée de main, de profiter de son entourage, de voir le monde évoluer… un peu moins vite que maintenant, mais évoluer quand même.
« Le premier touriste » (en l’occurrence une touriste !) résume en son seul titre toute la nostalgie et la fraîcheur contenues dans « Une vie d’enfant »
Henri Medori est l’auteur de nombreux ouvrages dont « Le Bleu de rivière » (roman) et « Rumeurs d’encre » (recueil de poèmes, primé par le Cercle Amélie Murat)
Une vie d’enfant » (14,90€) est publié par les Editions Aedis dont je vous invite vivement à consulter le site internet. Les collections sont très diverses, et j’ai un gros faible pour leurs guides et « pratiques » aussi précis que concis.
« Je suis le genre de fille »
J’ai hésité à chroniquer cet ouvrage car il peut agacer comme être adoré.
Ayant entendu des extraits lus par Nathalie Kuperman elle-même en séance de lecture, sa voix, son ton, sa gestuelle se sont posés sur l’écrit et me sont restés dans l’oreille. Et comme « en vrai » cette auteure est drôle, toute en dérision et auto-dérision, en timidité corrigée de bravades, cela m’est resté au long des 219 pages.
Sans cette expérience, peut-être aurais-je été agacée de tourner « sans le son » autour des névroses de l’auteur confrontées aux exigences sociales et sociétales. Peut-être n’aurais-je pas toujours saisi où placer le curseur. 1er ou 2d degré ?
Mais a-t-on besoin d’un curseur tant Nathalie Kuperman sait pointer les exigences, efforts, acceptations, révoltes, contraintes, voire aberrations que nous demande le rapport à autrui et…. à soi-même.
32 chapitres c’est un peu beaucoup, mais on ne peut pas reprocher à l’auteure de passer à côté de la plaque. D’autant plus que le politiquement correct est banni et on salue sa liberté de ton, même lorsqu’elle évoque le quotidien de ses rapports avec sa fille adolescente, son ex-mari (et sa nouvelle compagne) et ses collègues de travail.
J’ai ri (le dîner du 1er chapitre, la p… chez Franprix), eu la larme à l’oeil (nombreuses références à la mère), et comme beaucoup de femmes présentes à la lecture publique, je me suis largement reconnue.
Bref, « Je suis le genre de fille » est un livre particulier, pas mon préféré de Nathalie Kuperman, mais « qui me restera », ne serait-ce que pour le courage de l’auto-fiction.
(Flammarion – 18 €) N. Kuperman est l’auteur d’une dizaine de romans dont « Nous étions des êtres vivants », « La loi sauvage » et d’ouvrages Jeunesse